Sur le chemin de la maison après avoir pris de l'eau au puits. | © Simon Opladen / Helvetas

Visite de projets au Bénin

À la rencontre des personnes que nous soutenons
PAR: Lara Barbe - 11 juillet 2023
© Simon Opladen / Helvetas

Comment l’accès à l’eau ou à une formation a-t-il transformé la vie d’une personne, voire d’un village? Visiter un projet dans un pays partenaire, c’est avant tout se mettre à l’écoute de celles et ceux à qui il permet d’améliorer leurs conditions de vie. En mars 2023, Lara Barbe, chargée de recherche de fonds pour Helvetas en Suisse romande, s’est rendue au Bénin. Elle nous fait part de ses impressions.

En mars 2023, j’ai eu l’opportunité de visiter deux projets mis en œuvre par Helvetas dans le nord du Bénin. Helvetas est présente dans ce pays d’Afrique de l’Ouest depuis 1995, dans les domaines de l’accès à l’eau, à la formation professionnelle et à l’éducation. C’était un voyage marquant pour plusieurs raisons. L’une d’elles est que, même en tant que collaboratrice d’Helvetas, il n’y a rien de plus parlant pour réaliser l’importance du travail de l’organisation que de rencontrer les personnes et de les entendre parler elles-mêmes des difficultés auxquelles elles sont confrontées. Durant ma visite, ces rencontres ont été nombreuses.

De l’eau potable pour l’école de Ouagou

Nous avons commencé nos visites à Banikoara, dans le département de l’Alibori. Située non loin de la frontière avec le Burkina Faso et le Niger, Banikoara est connue pour être «la ville de l’or blanc», puisque c’est la première commune en matière de production de coton du Bénin. Le mois de mars étant encore dans la saison sèche, c’est sous un soleil de plomb et une chaleur écrasante que nous sommes arrivés à Ouagou, l’un des villages de la commune, après une heure de trajet depuis la ville de Kandi.

«L’école publique de Ouagou, c’est l’eau!» C’est avec ces mots que le directeur de l’établissement nous a accueillis. Il nous a permis de suivre les élèves durant toute une journée: le matin, avant le début de la classe, quand ils commencent leur journée par l’arrosage du jardin scolaire. À midi, quand ils déjeunent à la cantine – aujourd’hui raccordée à l’eau grâce au projet. Et, enfin, pendant les cours, durant lesquels des sujets tels que l’hygiène menstruelle sont aussi abordés.

À Ouagou, Helvetas intervient dans le cadre du projet NimDora qui favorise l’accès à des sources d’eau propre par la réalisation de forages. Couplé à un système de pompe solaire, ils permettent d’alimenter des points d’eau équipés de robinets. Au Bénin, malgré les récents progrès, il y a encore de nombreuses disparités dans l’accès à l’eau potable. Aujourd’hui, un peu plus de 70% de la population en milieu rural a accès à l’eau potable. L’hygiène et l’assainissement de base restent un défi. Helvetas travaille directement dans les communautés, mais aussi dans des écoles et des centres de santé.

Avant la mise en service des installations, les élèves devaient aller faire la queue et s’approvisionner en eau à 2 km de l’école, au seul point d’eau, situé aux abords du village. Les cours commençaient le plus souvent en retard à cause de ces va-et-vient à la pompe. Parfois même, quand l’attente était trop longue, ils puisaient directement de l’eau insalubre du puits de l’école pour la préparation des repas. Aujourd’hui, les élèves comme les enseignants et les enseignantes affirment être moins souvent malades depuis la mise en place des installations et de toutes les pratiques d’hygiènes promues par Helvetas.

Fini la corvée de l’eau à Timminringou

Assise dans la cour du chef du village de Timminringou – deuxième étape de notre visite de projet – en attendant le début de la visite, j’ai pu observer les discussions, l’agitation autour de la préparation du repas, les enfants en train de jouer autour de nous. Une chose était claire, les habitants ne sont pas malheureux. Ils nous ont, en revanche, expliqué précisément à quel point l’accès à l’eau potable a amélioré leur quotidien. Nous les avons notamment suivis jusqu’aux fosses, qu’ils avaient creusées eux-mêmes, où auparavant, les femmes allaient chaque matin puiser de l’eau pour les besoins quotidiens.

Elles se mettaient en route avant le lever du soleil pour parcourir les 6 km aller-retour et récupérer assez d’eau pour tout le foyer, avant de partir aider leurs maris aux champs. Lorsque je leur ai demandé si c’était dangereux, elles nous ont montré en riant les marques et traces sur leurs jambes, résultats des nombreuses chutes essuyées sur le chemin plongé dans le noir. Aujourd’hui, les trajets de nuit et les maladies hydriques font partie du passé, tout comme les déplacements onéreux au centre de santé, situé à 12 km du village.

Timminringou se trouve à 17 km de piste depuis la route principale. Il faut donc emprunter un chemin de terre rouge, bordé de petites maisons en banco (terre crue) à travers des paysages arides et parfois difficiles à pratiquer. En collaboration avec les autorités locales, qui identifient les communautés prioritaires en matière de besoin d’accès à l’eau, Helvetas est intervenue en 2021 pour raccorder le village et son école à l’eau. Les points d’eau y ont été inaugurés en décembre 2021, justement le jour où une nouvelle personne décédait, certainement des causes d’une maladie hydrique si l’on en croit le directeur de l’école du village.

 

Des élèves récupèrent de l'eau potable au forage de l'école.  | © Simon Opladen / Helvetas
Les élèves de Ouagou aux points d’eau installés en collaboration avec Helvetas dans la cour de l’école. © Simon Opladen / Helvetas
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Les élèves sont responsables du potager scolaire | © Simon Opladen / Helvetas
Les élèves, encadrés par le corps enseignant, sont en charge de l’arrosage, de l’entretien et de la récolte du jardin scolaire. © Simon Opladen / Helvetas
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Sur le chemin de la maison après avoir pris de l'eau au puits. | © Simon Opladen / Helvetas
Au village de Timminringou, les femmes ont la charge d’aller chercher l’eau. Mais désormais, elles n'ont plus à se rendre aux fosses d'eau, situées à 3 km.  © Simon Opladen / Helvetas
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Trois femmes devant un trou creusé qui donnait accès à de l'eau contaminée.  | © Simon Opladen / Helvetas
Des femmes du village de Timminringou nous ont montré les fosses où elles avaient l’habitude d'aller puiser l’eau. © Simon Opladen / Helvetas
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Une entrepreneuse nous présente son magasin | © Simon Opladen / Helvetas
Bertille Vignikin dans sa boutique de Natitingou. Elle y vend ses produits à base de beurre de karité, des jus locaux, des préparations au gingembre et de nombreux autres articles. © Simon Opladen / Helvetas
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Des jeunes qui prennent leur destin en main

Une autre raison pour laquelle ce voyage m’a marquée est la confirmation que les personnes soutenues par les projets d’Helvetas sont bien les seules à forger leurs destins. Cette affirmation a pris tout son sens lorsque nous avons discuté avec Bertille Vignikin, transformatrice de karité à Natitingou, dans le département de l’Atacora, où nous nous sommes rendus le huitième jour du voyage. Helvetas y mène le projet Anfanni, qui vise à former des jeunes adultes et à les accompagner vers l’entrepreneuriat. Bertille nous l’a dit elle-même: «Je savais que je voulais devenir entrepreneuse. Ma famille n’y croyait pas au début et ne m’encourageait pas dans cette voie.» Même sans ce soutien, Bertille a réussi, puisqu’elle est aujourd’hui à la tête d’un atelier de transformation et d’une boutique où elle revend ses produits à base de karité et d’autres ingrédients locaux. Mais ce n’est pas tout: elle emploie cinq personnes pour l’aider dans son commerce.

C’est avec l’appui d’Helvetas que Bertille s’est lancée dans la transformation de karité, domaine qu’elle ne connaissait pas, mais qui est l’un des plus porteurs sur le marché local. Elle a suivi une formation technique et une autre en gestion d’entreprise. Par la suite, elle a également obtenu un soutien pour faire connaître son activité, en participant par exemple à des foires locales. En 2022, elle a remporté le 1er Prix féminin du Meilleur Plan d’affaires, organisé en partenariat avec Helvetas. Cette récompense lui permet d’envisager ses prochains investissements sereinement. Elle est maintenant elle-même accompagnatrice de jeunes entrepreneurs et entrepreneuses dans le domaine de la transformation – et a déjà formé vingt personnes. Ensemble, ils peuvent travailler en réseau et renforcer leur présence sur le marché.

Cet exemple montre que pour améliorer ses conditions de vie, une personne n’a pas besoin de pitié, mais d’une chance équitable et concrète – que ce soit sous la forme d’un accès à l’eau potable, d’une formation ou de la possibilité de participer aux décisions collectives. Tel est aussi le message de la campagne actuelle de communication d’Helvetas. Et c’est ce à quoi nous travaillons sans relâche.

Cette visite de projet au Bénin s’est achevée avec les belles rencontres de plusieurs autres personnes accompagnées par le projet Anfanni et qui m’ont permis de découvrir des parcours de vie incroyables. Elle m’a profondément marquée, car nous avons eu l’occasion d’échanger avec les personnes directement impliquées dans nos projets. De quoi rappeler que les personnes que nous soutenons sont au cœur de notre travail.

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Le projet NimDora est essentiellement financé par des fondations et des institutions publiques ainsi que par des dons. Ces fonds sont complétés par des contributions de la DDC.

Le projet Anfanni est financé par différentes fondations, des contributions publiques et par des dons, complétés par la contribution de programme de la DDC.