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Coronavirus – points de vue du Sud, 7ème partie

Retrouvez les récits de trois employé.e.s d'Helvetas dans trois pays du Sud. 7e partie de leur quotidien marqué par la crise du COVID-19.
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Alors que nous vivons une "nouvelle normalité", des populations pauvres de pays en développement souffrent, et pas seulement à cause du coronavirus. Trois collaborateurs d'Helvetas de trois continents racontent régulièrement la vie quotidienne au Myanmar, au Burkina Faso et au Pérou. 7e partie de ce journal de bord.

Pérou: une aide vitale pour les migrants du Venezuela

Par Kaspar Schmidt, conseiller du programme d’Helvetas au Pérou

© Helvetas Peru
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L' Amérique du Sud est devenue un épicentre de la pandémie. Le nombre de nouvelles infections confirmées dans les pays de la région a encore augmenté ces dernières semaines. Le Pérou se classe maintenant au huitième rang mondial avec près de 200’000 cas, ces données relevant notamment des nombreux tests effectués. Ces derniers jours, les autorités ont fait état de chiffres légèrement inférieurs, avec environ 4500 nouvelles infections par jour. Le tournant tant attendu est-il en train de se produire? Le gouvernement péruvien a prolongé l'état d'urgence et la quarantaine jusqu'à la fin du mois de juin. Dans ce laps de temps, certains secteurs sont autorisés à reprendre leurs activités.

Le danger des marchés locaux et des banques

Pourquoi le nombre de cas continue-t-il d'augmenter dans la région? Comme dans d'autres pays émergents, la mobilité internationale des classes supérieures et moyennes a facilité la propagation initiale du virus. Le Pérou a très vite adopté des mesures de grande envergure. Toutefois, certaines de ces mesures ont été inefficaces en raison des fortes inégalités sociales et de la faiblesse des institutions publiques.

Au Pérou, environ 60% des personnes actives travaillent dans le secteur informel. Nombre d’entre elles dépendent d'un revenu quotidien et ne peuvent pas travailler à domicile. Les familles pauvres vivent souvent dans des espaces confinés. Elles peuvent difficilement respecter les règles de distance et ne peuvent pas s'isoler. Environ trois quarts des ménages pauvres n'ont pas de frigo et doivent faire des achats fréquents. En conséquence, les marchés locaux ainsi que les banques qui versent des aides publiques sont devenus des sources d'infection.

Des inconnus demandent de l'aide dans la rue

Comparativement à d'autres pays de la région, le Pérou a mis en place un vaste programme d'aide économique. Cependant, malgré le boom des matières premières de la dernière décennie, les services publics sont chroniquement sous-financés. Les conséquences de cela, entre autres des hôpitaux mal équipés en dehors de Lima et des installations sanitaires précaires dans les écoles publiques, rendent les mesures de prévention et les traitements médicaux plus difficiles.

Ces dernières semaines, des inconnus dans la rue m'ont demandé à plusieurs reprises de l'aide pour leur famille. Helvetas soutient les familles dans le besoin, entre autres par un projet d'aide d'urgence pour les migrants du Venezuela dans la ville portuaire de Callao, près de Lima, où le nombre de cas est toujours en augmentation. Actuellement, environ un million de Vénézuéliens vivent au Pérou, la plupart dans des conditions difficiles. La pandémie a rendu leur situation encore plus précaire. Ils ne reçoivent aucune aide de l'État péruvien.

Helvetas aide les familles les plus pauvres à survivre

Comme rapporté au début du mois d'avril, il n'a pas été possible, dans les conditions de l'état d'urgence, de remettre comme prévu des contributions en espèces de 100 francs suisses aux familles de réfugiés pour couvrir leurs besoins de base. Après une recherche minutieuse sur les modes de paiement électronique, les collaborateurs d'Helvetas sont finalement parvenus à verser des contributions à 200 familles de réfugiés depuis le début du mois de mai. Les paiements pour 360 autres familles sont actuellement en cours jusqu'en juillet. Les paiements sont effectués par l'envoi d'un bon sur le téléphone portable des bénéficiaires, qu'ils peuvent échanger auprès d'un agent local d'un fournisseur de services financiers. Nous contribuons ainsi à couvrir les besoins de base immédiats de ces familles pendant ces mois difficiles.

(écrit le 7 juin 2020)

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Coronavirus – points de vue du Sud, 1ère partie

Une collaboratrice et deux collaborateurs dans trois pays du Sud rendent compte des bouleversements que le coronavirus apporte dans leur vie quotidienne. Découvrir!
© AFP/PHYO MAUNG MAUNG

Coronavirus – points de vue du Sud, 2e partie

Récits du quotidien à mi-mars au temps du coronavirus - 2e partie

Coronavirus – points de vue du Sud, 3e partie

Récits du quotidien avec le coronavirus à fin avril au Myanmar, au Burkina Faso et au Pérou.
© Franca Roiatti | Helvetas

Coronavirus – points de vue du Sud, 4e partie

Récits du quotidien au temps du  coronavirus à fin avril au Myanmar, au Burkina Faso et au Pérou
© Keystone/AP Photo/Rodrigo Abd

Coronavirus – points de vue du Sud, 5e partie

Récits du quotidien au début mai au Myanmar, au Burkina Faso et au Pérou.

Coronavirus – points de vue du Sud, 6e partie

Récits du quotidien à mi-mai au Myanmar, au Burkina Faso et au Pérou.

Burkina Faso: les attaques armées compromettent le retour à la normale

Par Franca Roiatti, chargée de communication d’Helvetas en Afrique de l’Ouest

© Franca Roiatti
© Franca Roiatti

Ils attendent au bord de la route qui relie Ouagadougou à Bobo Dioulasso, tendant la main aux voitures qui passent. Ils tiennent des raisins sauvages dans leurs mains et espèrent les vendre avant la tombée de la nuit. Ils font partie des milliers d'enfants que la pandémie du Covid-19 a chassés des salles de classe du Burkina Faso depuis le mois de mars.

Le 1er juin, après de nombreuses discussions et reports, le gouvernement a rouvert les écoles, mais uniquement pour les enfants qui sont en année d'examen. Dans une école publique de Bobo Dioulasso, par exemple, seuls 72 élèves sur plus de 450 sont de retour. Avant le coronavirus, ils étaient assis très près les uns des autres, maintenant ils sont divisés en deux classes, assis séparément et portant des masques officiellement fournis par l'État.

Certaines écoles restent fermées à cause de la violence

Pour la plupart des enfants, l'école ne reprendra pas avant octobre et, dans certaines régions, elle ne reprendra pas du tout. Avant même la crise du Covid-19, plus de 2500 écoles au Burkina Faso étaient fermées en raison de la violence croissante. Des groupes armés ont menacé et tué des enseignants, intimidé des élèves et incendié des écoles.

Le conflit en cours, qui empêche le gouvernement de garder le contrôle de certaines parties du pays, ainsi que les élections présidentielles et parlementaires prévues en novembre, attirent à nouveau l'attention des médias.

Minibus pleins et besoin de normalité

Les immenses affiches le long des rues des villes principales qui invitent les gens à prendre des précautions, ainsi que les équipements de lavage des mains en plastique coloré devant les bars et les bureaux sont les signes visibles restant de la crise sanitaire. Le couvre-feu a été levé, les masques sont un accessoire plutôt négligé, les gens remplissent à nouveau les minibus et le tricycles sans trop se soucier de la distance sociale. Un grand besoin de normalité se fait sentir.

Des revenus grâce à la production de briques

La normalité est ce qui manque le plus à Safieta et à Awa. Elles ont été forcées de fuir leurs villages après de violentes attaques, et elles vivent maintenant avec la famille d'Asseta à Rambo. Ensemble, les trois femmes produisent des briques pour les latrines que notre projet WASHPRO construit pour les personnes déplacées et leurs communautés d'accueil. En vendant les briques, les femmes peuvent gagner un peu d'argent complémentaire: «J'aimerais acheter un téléphone portable pour pouvoir rester en contact avec mon mari et mes enfants, qui travaillent comme mineurs, explique Safieta, 42 ans et mère de cinq enfants, et aussi pouvoir prendre des nouvelles des amis et voisins qui vivent encore dans mon village». Awa, 32 ans, a trois enfants pour lesquels elle veut acheter des vêtements. Elle n'a pas pu le faire depuis le début de la crise car elle a perdu toutes ses sources de revenus.

(écrit le 8 juin 2020)

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Myanmar: Call Me Today!

Par Peter Schmidt, directeur d’Helvetas Myanmar

© Kyaw Zin
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Chaque jour, je parle à ma femme au téléphone en Suisse et je vis ainsi le retour progressif à la normalité. Chaque jour, je regarde aussi les derniers chiffres mondiaux sur le Covid-19: depuis quelques jours, le nombre de nouvelles infections confirmées dépasse largement les 100’000. Les pays où les cas doublent le plus rapidement sont le Népal, Haïti et l'Éthiopie, qui sont tous des pays partenaires d'Helvetas. Même si nous en avons tous assez, d'un point de vue global, la crise sanitaire est loin d'être terminée et la crise économique ne fait que commencer!

Après 61 soirées passées seul à la maison, j'ai récemment dîné dans un restaurant réouvert. J'attendais cette sortie comme un adolescent! Le nombre de cas au Myanmar est encore faible. Nous avons mis nos bureaux en service par roulement, si bien que trois fois par semaine, je traverse à nouveau les six voies de Pyay Road.

Non seulement au chômage, mais aussi sans abri

Récemment, en arrivant au bureau, Ma Phyu, qui assure son fonctionnement, était déjà là et menait une conversation téléphonique manifestement très animée. À midi, j'ai appris ce qui s'était passé: le propriétaire de l'école privée où vivent Ma Phyu et son mari, où ce dernier travaille comme gardien et n'a pas reçu son salaire depuis des mois à cause du coronavirus, a décidé de fermer l'école. Il leur a donné exactement une demi-journée pour faire leurs bagages et déménager. Le mari de Ma Phyu n'est pas seulement au chômage, les deux sont maintenant sans abri.

Une Hotline pour les personnes touchées par le Covid-19

Notre employée et son mari ne sont pas les seuls à être actuellement en situation d'urgence. Les migrants, par exemple, souffrent aussi beaucoup du coronavirus et de ses conséquences. Helvetas les aide via les conseils de l'organisation d'aide "Call Me Today", que nous soutenons financièrement. Il s'agit d'une petite soupape pour affronter des situations stressantes.

Kyaw Zin, un jeune militant, a fondé "Call Me Today" il y a deux ans après le suicide d'une connaissance homosexuelle. Dans sa lettre d'adieu, celui-ci avait déclaré qu'il n'avait personne à qui parler de sa situation. Si "Call Me Today", une sorte de main tendue, avait déjà existé à cette époque, il serait peut-être encore en vie. Aujourd'hui, Kyaw Zin et ses collègues formés en psychologie proposent une Hotline pour les victimes du Covid-19, y compris pour les migrants.

Les conséquences économiques sont aussi existentielles

Kyaw Zin me parle de deux cas exemplaires: «Un agent de sécurité d'une usine dans l'un des quartiers les plus pauvres de Yangon est licencié. Il n'ose pas se plaindre à son employeur.» Dans ce cas, Kyaw Zin le met en contact avec un syndicat que nous connaissons. Le deuxième cas: «Peu avant que Covid-19 apparaisse, un couple a contracté un emprunt auprès de parents pour acheter une voiture afin de fournir des services de taxi. Les interdictions imposées par le coronavirus ont rendu cela impossible. La famille n'a pas de revenus, est endettée, doit payer des intérêts et a perdu le soutien du voisinage car les voisins pensent que la famille est riche puisqu'elle possède une voiture». Les conséquences économiques du Covid-19 sont brutales et existentielles. Heureusement, Ma Phyu et son mari ont rapidement trouvé un endroit où vivre. Même si ce n'est que pour trois mois...

(écrit le 6 juin 2020)

L'Afrique, l'Asie du Sud et l'Amérique latine doivent se préparer au pire

Le coronavirus est désormais arrivé dans les régions les plus pauvres du monde. Là où les hôpitaux sont mal équipés et l'accès à des centres de santé difficile. Nous pouvons agir tous ensemble!