© Helvetas/Nomwindé Sawadogo

Une femme qui se bat pour la santé de sa communauté

Les gens de Dayendé l’appellent « oyongnou » qui signifie « propreté ». Un surnom que Christine Dayamba a gagné grâce à son engagement en faveur de la promotion de l'hygiène. Au début, elle a même subi quelques moqueries, mais son enthousiasme n'a pas faibli.
PAR: Rose Congo - 17 mai 2021
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C’est tôt le matin, la cour où habite Christine avec sa famille est impeccable. Au centre, se trouve un dispositif de lavage de mains (tippy-tap), un hangar où les marmites et les ustensiles de cuisine sont propres et bien stockés et un autre où sont rangés le mortier et le pilon, à l’abri des animaux. Les membres de la famille sont assis sous un hangar au côté sud de la cour en train de causer.

« J’ai participé à une formation, sur l’hygiène et l’assainissement assuré par les agents de Helvetas. Ainsi, j’ai compris qu’il est important de couvrir les eaux de boissons et les ustensiles de cuisine ; de nettoyer la cour, mettre en place des poubelles, construire des latrines afin de contrôler et prévenir les maladies » se souvient Christine, 46 ans mère de six enfants, commerçante de galette et cultivatrice pendant la saison pluvieuse.

Après cette formation, Christine était impatiente de repartir à la maison pour apporter le message à sa famille et aux voisins. Elle s’est rendue immédiatement dans la cour voisine pour parler de ce qu’elle avait appris et avant son départ, les femmes de cette famille avaient déjà commencé à nettoyer la cour. C’est ainsi qu’elle a réalisé que son message a été compris. Et qu’elle devait continuer à partager ses connaissances.

Christine est surtout convaincue que pour pouvoir amener les autres à adopter un comportement approprié, il faut d’abord donner le bon exemple. Même si ce n’est pas toujours facile. « Le terrain où se trouve notre maison est caillouteux, nous ne pensions pas que nous pourrions réaliser des latrines. Mais pendant la formation, j’ai compris que ce n’est pas impossible » déclare-t-elle. Christine a abandonné toutes ses activités de commerce et a informé sa belle-mère de son désir de construire une latrine et qu’elle souhaiterait avoir son aide. Les deux femmes se sont donc mises au travail. Elles ont réuni les matériaux : pèle, pioche, corde, etc.  et ont commencé à creuser la fosse.  « Nos voisins pensaient que nous avions perdu la raison » raconte Christine. Après avoir creusé à une certaine profondeur, elles ont rassemblé les briques et le maçon est venu pour implanter la superstructure. Finalement, les enfants les ont aidés dans la construction.

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Grâce à son engagement, elle arrive à mobiliser les uns et les autres pour l'aider à construire sa latrine © Helvetas/Nomwindé Sawadogo

La latrine devient bénéfique pour tous

Pour Christine, réaliser la latrine était simplement « nécessaire » et les gens du village ont commencé à comprendre la raison de tous ses efforts : « Après la construction de la latrine, les jeunes qui causent chez le boutiquier du quartier non loin de ma cour, furent les premiers à en bénéficier, car il fallait parcourir une longue distance pour aller déféquer à l’air libre. C’est ainsi qu’ils témoignèrent de l’importance de ma latrine » confia Christine.

Le mari de Christine est très fier d’elle et il a bien appris ses enseignements aussi, car il a réalisé une seconde latrine pour la famille qui rivalise avec celle de sa femme. Aussi, les habitants de son village apprécient ses actions. « C’est une femme battante, quand elle décide de faire une activité, personne ne peut l’arrêter à cause de sa détermination. Elle a réalisé sa propre latrine pour montrer aux membres du village que tout est possible. Sa latrine a été vraiment bénéfique pour nous parce qu’il n’en existait pas dans le quartier et la majorité des habitants utilisent sa latrine » témoigne Benyombo Komondi, un habitant du village.

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 Cette latrine a permis de mettre fin à la défécation à l'air libre dans le quartier © Helvetas/Nomwindé Sawadogo

La sensibilisation sur l’hygiène, une passion pour Christine

Grâce à son engagement pour le changement, Christine a intégré le Comité Villageois d’Assainissement (CVA) de Dayendé où elle occupe le poste de présidente. Ce comité est mis en place par Helvetas à travers le projet LAAFIA, qui intervient dans la province de la Gnagna pour accompagner les populations à prendre en charge leurs problèmes d’eau et d’assainissement. L’objectif du projet est de faire comprendre aux populations l’importance de construire et bien utiliser des latrines familiales et d’adopter des bonnes pratiques en matière d’hygiène.

Le CVA de Dayendé est composé de quatre personnes volontaires dont Christine, qui suivent les engagements des com­munautés du village en matière d’hygiène et d’assainissement. Il assure des sen­sibilisations sur les bonnes pratiques d’hygiène grâce aux formations re­çues. Pendant les séances de sensibilisation, elle explique aux membres de sa communauté, l’importance de construire les latrines, car après la défécation à l’air libre et à la suite des pluies, les microbes se retrouvent dans les eaux de surface ou dans les puits non couverts. 

« C’est important de stocker les ordures dans un endroit après avoir balayé la cour » rappelle Christine au groupe de femmes qui l’entoure en l’écoutant attentivement. « Et surtout, il faut laver les enfants et se laver tous les jours !» répète-elle. Les hommes et les enfants qui se sont rapprochés pour mieux écouter posent des questions : « combien de fois, il faut se laver par jour, comment faire un tippy tap…Christine ne se lasse pas de répondre.

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Elle invite les membres du village à préserver leur santé par l'adoption des bonnes pratiques d'hygiène et en construisant des latrines © Helvetas/Nomwindé Sawadogo
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Elle explique la méthode de lavage des mains © Helvetas/Nomwindé Sawadogo
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Les adultes et les enfants reçoivent des cours pratiques © Helvetas/Nomwindé Sawadogo
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Du savon liquide pour faciliter la propreté

Le projet LAAFIA organise aussi des cours de formation au profit des CVA dans la fabrication du savon liquide. Le but est de le rendre accessible aux couches les plus vulnérables pour faciliter l’adoption des bonnes pratiques d’hygiène. Christine a bénéficié de cette formation « nous produisons le savon liquide trois fois par semaine. Après la fabrication, nous les remettons à des connaissances pour les commercialiser dans les marchés et nous vendons le reste dans les ménages. Notre savon est vendu aussi au Centre de Santé et de Promotion Sociale (CSPS) et est apprécié par tous » explique-t-elle. « Auparavant, de nombreuses personnes du village, ne savaient pas que chaque matin, il fallait se laver et rendre propres les enfants. On ne parlait pas du savon. Grâce à la formation reçue sur la production du savon liquide, maintenant tout le monde peut en acheter. Les hommes et les femmes peuvent en avoir facilement pour laver les ustensiles, nettoyer la maison, laver les habits et se nettoyer soi-même. Les femmes CVA continuent à se battre pour améliorer les conditions d’hygiène » affirme-t-elle.

L’activité de production et la vente du savon sont bénéfiques pour les membres du CVA, car les bénéfices sont utilisés pour subvenir aux besoins des membres.  Avant la venue du projet LAAFIA, les poules, moutons, chèvres, etc. mouraient parce qu’ils consommaient les fèces des personnes. Avec la présence des latrines, les animaux ne meurent plus et il y a beaucoup de volailles et de bétail dans le village. « Cette année, mon enfant a gagné 70 000 Francs avec la vente des poules » déclare Christine. La présence des latrines et les actions de sensibilisation ont permis également de prévenir certaines maladies comme la diarrhée, les maux de ventre, le choléra etc. Pour Benyombo Komondi, Christine a beaucoup aidé le village à travers ses actions qui sont appréciées par tous.  Grâce aux sensibilisations, les gens ont construit des latrines et la défécation à l’air libre est en train de prendre fin.

 

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«Dans l’avenir, je compte faire l’élevage de la volaille, des bœufs, des moutons, des chèvres et ouvrir une boutique. Je souhaite que l’hygiène et l’assainissement soient le quotidien de tous les habitants de Dayendé et qu’il y ait la cohésion sociale parce que c’est ensemble que nous allons pouvoir apporter le changement»

Christine Dayamba, 46 ans, mère de six enfants